Que ce soit la hausse de la demande, la pénurie de matériaux, les retards de livraison ou l’inflation, l’industrie du meuble ne cesse d’être confrontée à de nouveaux défis issus de la tension qui règne sur le marché mondial. Elle est pourtant souvent citée comme l’une des gagnantes de la crise. Voici un aperçu de la situation actuelle et des perspectives d’avenir.

A première vue, le secteur de l’ameublement paraît en plein essor: on se replie sur soi-même et on aménage son espace de vie. Finis les voyages vers des destinations lointaines, l’heure est à l’optimisation et à l’embellissement de nos intérieurs. Même si le premier confinement de 2020 a laissé des traces suite aux fermetures de magasins, aux ruptures des chaînes d’approvisionnement et à la restructuration des entreprises, les chiffres et le moral repartent à la hausse. Et bien davantage: selon GfK Suisse, le secteur de l’ameublement a, pour la première fois depuis plus de dix ans, renoué avec la croissance en affichant même un taux de 4,6 pour cent en 2020.
Aucun doute, le foyer est devenu le refuge face à la crise. On redécouvre le cocooning, cette tendance qui célèbre le repli chez soi, éveille des désirs et crée des nécessités: du canapé paysage pour une détente maximum ou de l’îlot de cuisine high-tech au réaménagement du bureau à domicile avec fauteuil de direction, en passant par une nouvelle légèreté de l’être qui s’exprime dans des meubles de jardin ou des piscines.

Actuellement, celles et ceux qui le peuvent optimisent le confort et la fonctionnalité de leur habitation. Cela passe par des achats individuels, voire une refonte complète de leur espace de vie. Il est difficile de dire combien de temps cette tendance durera: la boule de cristal qui nous servait à prédire l’avenir s’est fissurée depuis. Toutefois, une chose est sûre: la pandémie qui a soudainement bouleversé notre monde n’est pas près de nous quitter. Le premier train de mesures d’urgence prises avec rapidité sera suivi d’un processus qui gagnera successivement tous les domaines. Parfois de manière frappante, parfois de manière plus subtile, avec des obstacles ou de nouvelles chances à la clé.
Savoir attendre La redécouverte du «chez soi» en tant que valeur continue d’être une tendance de fond et la demande reste forte. Cela dit, celles et ceux qui sont en quête d’une nouvelle cuisine ou d’un système d’étagères doivent s’armer de patience. En effet, de nombreux matériaux tels que les dérivés du bois, les composants métalliques, les mousses de rembourrage, les tissus d’ameublement ou encore les matériaux d’emballage sont en rupture de stock. Une grande partie des matières dont se servent les fabricants de meubles est quasiment indisponible à l’heure actuelle, un défi qui, selon toutes prévisions, devrait s’estomper vers la fin de l’année.

Le temps, c’est de l’argent! La pénurie de matériaux entraîne non seulement des retards de fabrication, mais aussi une hausse des coûts de production chez les fournisseurs, hausse qui sera répercutée sur le client final. Pour avoir des essences locales telles que le chêne, le hêtre, le noyer ou les conifères, il faudra débourser davantage que l’an passé. Cependant, celles et ceux qui privilégient les meubles en bois massif issus de manufactures régionales seront récompensés par une qualité supérieure et une longévité à toute épreuve: des valeurs qui ne changent pas.
Très prisés… La gamme proposée est une autre clé du succès. Alors que les meubles de cuisine et les meubles rembourrés sont particulièrement prisés actuellement, les fabricants de meubles de bureau ont, jusqu’à présent, plutôt enregistré des pertes consécutives à la restructuration des entreprises et au transfert des activités vers le télétravail. On le sait: rien n’est permanent, sauf le changement. Il est vrai que la flexibilité et la polyvalence sont depuis longtemps de mise et que les nouveaux concepts de nomadisation du travail qui mettent à l’abri des crises ont plus que jamais le vent en poupe. En outre, plus un meuble est capable de réagir spontanément au contexte en place et de s’adapter entre espace de vie et espace bureau, plus il est porteur d’avenir. Il est par ailleurs certain que les thèmes qui font l’actualité tels que la santé, l’ergonomie et le développement durable gagneront encore en importance et se refléteront dans tous les domaines de l’ameublement.

La vente en ligne Le secteur ne manque pas d’idées ni de solutions: aujourd’hui, il s’agit plutôt de recombiner certains aspects et de les faire évoluer dans un contexte incertain – qu’il s’agisse de meubles, de concepts, de modes de production ou de canaux de distribution. De nombreux fabricants ont déjà profité du premier confinement pour peaufiner le développement de leurs produits et aborder de nouveaux thèmes. Parmi ceux-ci, la conception et la réalisation des boutiques en ligne, véritables gagnantes de la pandémie et canal de distribution dont la popularité n’est pas près de fléchir. Là encore, nous avons besoin de solutions hybrides qui, à l’avenir, associeront encore davantage le commerce traditionnel au commerce en ligne.

La personnalisation fait la différence Toutefois, malgré tous les achats effectués en ligne et les diplômes en bricolage qui s’ensuivent, le ou la spécialiste demeure une figure contournable. Du conseil à la réalisation en passant par une conception personnalisée: c’est encore mieux si elle ou il est disponible sur place. Aussi curieux que puisse paraître ce repli sur soi au premier abord, il éveille en même temps un besoin de rencontres et d’échanges. Y compris pour les questions d’aménagement intérieur. Sur ce point, c’est surtout le fabricant de meubles attitré qui remporte la mise. En effet, le conseil personnalisé et la fabrication sur mesure demeurent irremplaçables, peu importe où le vent de la crise nous mènera.
Texte: Julia Hauch